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February 2024
Lexique franco-punk
Vincent Bouat-Ferlier
Absence de contraintes dans le premier et refus de l’ordre et du principe d’autorité dans le second vont à l’encontre de l’ordre nécessaire pour organiser intellectuellement un fonds d’archives et le rendre compréhensible au chercheur. La définition des archives donnée par le Code du patrimoine (art. L211-1 modifié) est claire et montre le champ très vaste du domaine des archives : « Les archives sont l’ensemble des documents, y compris les données, quels que soient leur date, leur forme et leur support matériel, produits ou reçus par toute personne physique ou morale et par tout service ou organisme public ou privé dans l’exercice de leur activité ». Cette définition inclut donc une grande variété de supports que l’on peut retrouver dans les fonds intéressant le mouvement punk. Par exemple, seront considérés comme archives les fanzines, mais également les supports liés aux événements. On peut aussi considérer, sans être exhaustif, flyers, affiches, billets d’entrée, photos de répétitions ou de concerts[031] comme des archives. Cette variété est d’autant plus importante que les sources institutionnelles pour les archives sont très pauvres. Un exemple amusant et significatif concerne la rareté des sources concernant le punk aux Archives nationales : parmi les – très – éparses mentions, on retrouve dans le fonds de la Direction centrale des Compagnies républicaines de sécurité du ministère de l’Intérieur un rapport technique mentionnant un concert de musique punk en mai 1987 (Archives nationales, 19990044/8). Dans les fonds du cabinet du ministère de la Culture, le mouvement punk n’apparaît pas non plus, comme s’il n’avait jamais fait partie de la sphère culturelle. Cette aridité des sources est aggravée par plusieurs facteurs. Le vieillissement des acteurs du mouvement, d’abord, fait craindre une disparition ou une dispersion des archives. Le caractère éphémère des supports, ensuite, n’a pas facilité la conservation d’une mémoire punk, flyers et affiches n’étant par définition pas faits pour durer. Le contexte de création, enfin, a été un critère de disparition des sources : productions alternatives souvent à faible coût et de médiocre qualité, donc peu pérennes. Diffusées hors des circuits traditionnels et du cadre du dépôt légal, les archives du punk ne se trouvent pas non plus à la Bibliothèque nationale de France. Ce sont donc des initiatives de personnes privées qui ont permis de retrouver et conserver une partie des archives du mouvement, plutôt à partir des années 2010. Parmi elles, The punk Archives, The PunckRockArchives ou encore LSC punk Archives ont été des précurseurs. Mais ces initiatives ne permettent souvent pas d’effectuer un archivage sur le long terme et les sites, en plus de ne pas être toujours maintenus, ne sont souvent ni normés ni référencés. Plusieurs pistes, explorées par le projet PIND notamment, permettraient de reconstituer une histoire et une mémoire fragilisées : la collecte chez des acteurs du mouvement, la création d’archives orales, le dépôt d’archives collectées dans des centres adaptés à leur bonne conservation, ou encore la création d’un portail de ressources, seraient parmi les premières actions à mener. Pour n’évoquer que la collecte, le travail effectué par PIND sur les archives des Sales Majestés ou encore de la radio libre toulousaine Radio FMR a été un succès qui a permis, de façon rationnelle, de traiter les fonds en attendant leur exploitation par des chercheurs. Cet essai demande à être rapidement transformé pour éviter la perte irrémédiable d’un courant musical et culturel majeur.
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February 2024