La scène punk est souvent associée à l’absence de perspectives, au refus des codes, à la galère, à la glande et à la précarité. Dès lors, évoquer la question de la réussite peut sembler paradoxal, voire éminemment provoquant. « Réussir dans le punk » ne revient-il pas à trahir la cause des marges, la subversion du No Future, et pactiser avec les démons de l’industrie musicale ? Pour autant, les punks ont aussi su dépasser leur « fierté de ne rien faire » pour réinventer leur avenir et transformer leur vie au sein de groupes et de projets artistiques, à travers la création de collectifs, en mobilisant des valeurs, des ressources et des compétences qui ont permis de définir d’autres paradigmes de la réussite.
Cette journée d’étude souhaite donc explorer cette apparente contradiction en envisageant les significations que peut prendre la réussite tant du point de vue de la gestion problématique du succès, de la porosité des frontières entre underground et mainstream, de la récupération commerciale, que d’une perspective plus ontologique de la construction de soi et d’accomplissement personnel. Ces différentes questions pourront être abordées au prisme de l’interdisciplinarité, en mobilisant l’histoire, la musicologie, et plus largement les sciences sociales et la philosophie, à travers des contributions pouvant évoquer autant le fonctionnement de la scène punk en France que le parcours spécifique de groupes ou d’acteurs. Il s’agira de revenir sur certains préjugés qui marquent les rapports entre réussite et scène punk (Peut-on faire carrière dans le punk ? Qu’est-ce qu’un tube punk ? Peut-on réussir sa vie grâce au punk ?), de mettre en lumière des aspects peu connus de la scène punk en France depuis 1976, qui concernent aussi bien son fonctionnement que son insertion dans l’économie musicale et la vie sociale, et enfin d’éclairer les conditions qui font potentiellement du punk un levier d’émancipation et un socle de formation personnelle.